Dylanesque

Don'tLookBack

Samedi 7 avril 2012 à 10:41

Note : Voici une interview que j'ai pu réalisé avec l'aide de Radio Campus Angers, la radio étudiante qui me permet depuis 2008 de partager encore plus de musique avec mes deux émissions MellowYellow! (americana-pop moderne) et BangBangRock&Roll!, diffusés le mardi entre 19h et 21h. Pour écouter les émissions en direct, retrouvez les podcasts et les playlists ou tout simplement en savoir plus sur Radio Campus Angers, rendez-vous sur nos pages Facebook ou sur le site officiel : http://www.radiocampusangers.com

La première fois que Radio Campus m’a envoyé au Chabada, c’était en 2009 et c’était pour interviewer David-Ivar, alias Yaya, prolifique songwriter qui vadrouille depuis une quinzaine d’années en compagnie du groupe à géométrie variable, Herman Dune. Un groupe qui m’enchante depuis que “Mas Cambios” a illuminé de belles journées de printemps alors que je révisais mon bac. C’est “Next Year in Zion” qui avait ensuite inauguré notre toute première émission, à l’automne 2008. Tout cela ne nous rajeunit pas mais le fait est que lorsqu’on le retrouve de nouveau à Angers jeudi dernier, Ya Ya n’a pas pris une ride.

Il est dans sa loge, profitant d’un moment de tranquillité pour une sieste bien mérité. Tandis que Néman, le fidèle batteur, continue de recharger ses batteries, David-Ivar accepte de répondre à nos questions. C’est qu’on a tellement de choses à lui demander. “Strange Moosic”, leur dernier album, sorti il y a presque un ans, est d’une douceur infinie que l’on attendait impatiemment de voir illuminé la scène du Chabada, où le groupe à ses habitudes. Et la récente prestation à la Cité de la Musique en hommage au “Shot of Love” de Dylan a réanimé notre amour inconditionnelle pour le duo. Alors c’est de ça qu’on va parler. Du nouvel album, de Dylan, de cette nouvelle page qui s’ouvre pour le groupe et qui nous donne envie de les suivre d’encore plus près.

Depuis votre dernier passage à Angers, en 2008, vous avez eu le temps de créer votre propre label, « Strange Moosic » et d’enregistrer un nouvel album à Portland. Le début d’un nouveau chapitre pour Herman Dune ?

Chaque album est très différent mais je pense pas vraiment en termes de périodes. Au moment d’enregistrer, je me demande quelle serait la meilleure façon de donner vie à mes chansons. Pour « Strange Moosic », on avait envie de créer notre label depuis longtemps, ça nous a permis de nous lancer dans une nouvelle aventure, de chercher un bon studio, de prendre le producteur que l’on voulait [Adam Selzers]. De vraiment prendre le temps d’avoir l’album que l’on souhaitait, aussi bien au niveau musical que visuel, puisque l’album est sorti sous forme de livre, ce que je voulais depuis longtemps.

Est-ce qu’on retrouve la même effervescence aujourd’hui à Portland qu’à New York au début des années 2000 ? Avez-vous fait de nouvelles rencontres, rencontré une nouvelle famille ?

À Portland, il y a beaucoup de musiciens, d’artistes, d’auteurs-compositeurs, beaucoup de musique se fait là-bas actuellement, c’est comme un nouveau Nashville. Mais finalement, quand on enregistre un album, on reste très fermé, on part pas vraiment à la recherche d’une scène. On est resté en studio sans vraiment aller voir des concerts, sans vraiment en faire. Ce qui nous empêche pas de connaître pas mal de gens sympa à Portland, oui.

Tu voyage souvent entre la France, la Suède, New York, Portland et de nombreux pays. C’est quoi ton port d’attache, l’endroit où tu te sens le plus chez toi ?

Quand j’arrive à New York, j’ai vraiment l’impression de revenir chez moi. C’est la ville qui m’a le plus marquée dans ma vie d’adulte. J’y ai débarqué quand j’avais une vingtaine d’années et c’est là que je me suis affirmé en tant qu’artiste et qu’individu. Quand je vais à Paris, je me sens chez moi aussi parce que j’y ai grandi, mais c’est moins lié à la personne que je suis aujourd’hui. En Suède, je me sens chez moi car ma famille est originaire de là-bas. Quand tu es petit, tu te fabrique ta personnalité par rapport à tes origines et je me suis toujours senti très proche de la Suède.

Et d’après toi, c’est quoi l’endroit idéal pour savourer « Strange Moosic » ?

En général, je trouve qu’on apprécie bien un disque en voiture. J’aime bien conduire en musique. En rêvant, en regardant par la fenêtre…

Comme Jon Hamm dans le clip de « Tell Me Something I Don’t Know » ?

Oui voilà, dans ce genre de belle voiture américaine ou bien dans une Ford Galaxy, une voiture qui fasse pas trop de bruit pour pouvoir tout de même écouter la musique. Et puis si possible un jour où le temps a quelque chose à offrir, que ce soit de l’orage ou du soleil.

Le 10 mars dernier, vous étiez sur scène à Paris pour reprendre en entier l’album « Shot of Love » de Bob Dylan, à l’occasion d’une exposition qui lui était consacré à la Cité de la Musique. Chaque passionné de Dylan à une histoire particulière avec chacun de ses albums, chacune de ses chansons. C’est quoi votre histoire avec « Shot of Love » [publié en 1981] ?

Il y a beaucoup d’albums de Dylan que je connais depuis toujours, grâce à mes parents, qui l’écoutent beaucoup. Ces albums-là sont pour moi presque génétiques : « New Morning », « John Wesley Harding », « Selfportrait », « The Times They Are A-Changin’ » ou « The Freewheelin’ », ils passaient en boucle chez moi quand j’étais gamin. Je me suis jamais posé la question de savoir si je les aimais ou pas, ils étaient là. « Shot of Love » est venu plus tard. J’avais douze ans et je voulais faire plaisir à mon père en lui achetant les trois premiers volumes des « Bootlegs Series » [compilations d’inédits et de prises alternatives comprenant neuf volumes] et il y a « Every Grain of Sand » dessus, une chanson qui m’a toujours fascinée et qui m’a poussé à acheter « Shot of Love », que j’ai immédiatement adoré. Je me suis rendu compte qu’il devenait vraiment très important pour moi à l’époque où on était en tournée avec Turner Cody [chanteur country et ancien bassiste du groupe] avec qui je partage une passion pour Dylan, et sur cette tournée on écoutait « Shot of Love » tous les jours, je pouvais plus m’en passer. On a souvent une relation personnelle avec les albums de Dylan, et « Shot Of Love », c’est ça pour moi, quelque chose de spécial.

Et « Shot Of Love », c’est finalement un choix qui paraît évident pour Herman Dune, on pourrait presque croire avec des morceaux comme « Heart of Mine » ou « In the Summertime » qu’il s’agit de vos propres chansonsEt il y a une belle émotion lorsque ton père monte sur scène pour jouer de l’harmonica sur « Every Grain of Sand ».

Oui, il jouait déjà sur quelques morceaux de « Next Year In Zion » et c’est important pour moi de l’inclure dans mes projets. C’est lui qui m’a appris à aimer la musique et qui m’a fait découvrir Dylan. Il m’a transmis une éducation, une certaine foi et « Every Grain of Sand » évoque cette foi, celle des ancêtres de mon père et celle qu’il a voulu me transmettre. Donc oui, c’était assez émouvant de jouer une chanson aussi belle, aussi pieuse, avec mon père.

En tant qu’illustrateur, quel regarde porte-tu sur la carrière de peintre de Dylan ?

Déjà, Dylan dessine très bien, j’ai toujours adoré la pochette de « Selfportrait » ou les dessins qu’on retrouve dans « Blood on the Tracks ». Et récemment, il a fait beaucoup d’expositions, comme « The Brazil Series », que j’ai vu à Copenhague, c’était le cadeau d’anniversaire de ma copine. C’était fantastique, très influencés par les peintres fauves, on voit qu’il aime beaucoup Matisse. Et c’est intéressant car on retrouve dans ses dessins la manière dont il observe le monde dans ses chansons. On y retrouve beaucoup de détails, d’amour des situations, une envie de raconter des histoires. Et puis objectivement, c’est un très bon peintre, il a la technique, il sait ce qu’il fait, il n’expose pas son travail parce qu’il est Bob Dylan, mais parce qu’il est un bon peintre avant tout.

Et Dylan sait écrire également, comme nous le prouve sans cesse ses chansons et la publication de ses « Chroniques », en 2004. Toi aussi, tu écris et on peut régulièrement lire de petites nouvelles sur ton blog. Tu aurais envie de publier ce travail, d’écrire sur une forme autre que la chanson ?

La chanson, c’est déjà une forme qui me suffit en soi, mais oui, évidemment, j’aimerais continuer d’écrire. Récemment, j’ai eu une nouvelle publié dans une revue littéraire américaine et j’adore cet exercice. Mais ça demande une certaine concentration et une certaine solitude que je n’obtiens pas souvent dans ma vie d’artiste, surtout en tournée. Dès que j’ai une minute à moi, j’essaye d’écrire autant que je peux.

Avec Herman Dune, tu écris des textes très personnels, qui sont liés à des moments précis de ta vie. Alors est-ce qu’au fil du temps, tu finis par te sentir éloigné de tes compositions les plus anciennes ?

Pas forcément, car même si ça reste personnel et que les anecdotes que je raconte appartiennent au passé, c’est surtout l’écriture en tant que tel qui m’intéresse, l’expression. Donc ce n’est pas parce que l’histoire n’est plus valable ou que la fille n’est plus dans ton cœur que les mots n’ont plus de valeur. Quand il m’arrive de chanter une chanson des premiers albums, que ce soit « Turn Off the Lights » ou « Switzerland Heritage », c’est les mots qui me parlent plutôt que ce à quoi ils font référence. Et j’espère que les gens qui écoutent ressentent la même chose. En général, quand on se sert de choses personnelles pour écrire, ce n’est pas pour raconter sa vie mais pour l’utiliser comme d’un matériau. Sinon, on aurait besoin de connaître la biographie d’un artiste pour pouvoir apprécier sa poésie. Et si j’avais envie de raconter ma vie, j’irais chez un psychanalyste…

On parlait tout à l’heure de nouvelles rencontres. Tu peux nous en dire un peu plus sur votre collaboration avec la marque de vêtements « Petit Bateau » ?

On a été contacté par « Petit Bateau » pour une collaboration artistique. Ils travaillent avec des stylistes d’habitude et là, ils souhaitaient travailler avec le groupe et aussi avec moi en tant qu’illustrateur. Je connaissais pas forcément très bien la marque mais elle a une bonne réputation, elle est éthique et n’emploie pas de produits animaux, alors j’ai dit pourquoi pas. J’ai envoyé des dessins, des motifs, ils ont été acceptés et ils nous ont même fabriqués une chouette figurine Baby Blue [le yéti mascotte du groupe].

Vous suivez toujours les projets de l’ancienne bande new-yorkaise : Turner Cody, James Levy, Adam Green et les autres membres de la scène étiquetée « anti-folk » ?

Oui, j’ai toujours des nouvelles. On a retrouvé Jack Lewis [le frère de Jeffrey Lewis] qui habite à Portland ; Turner Cody, c’est l’un de mes meilleurs amis, on se parle pratiquement tous les jours, j’adore jouer et chanter avec lui ; James Levy, j’aime beaucoup son nouvel album [« Pray to Be Free », sorti en février]mais on n’a jamais rien fait ensemble pour le moment, pourquoi pas, c’est un bon copain ; Adam Green, je le connais pas tant que ça, c’est avant tout un bon pote à Turner, je suis plus proche de Kimya Dawson, qui chantait avec lui à l’époque des Moldy Peaches.

Est-ce que Néman continue de travailler avec ZOMBIE ZOMBIE, son projet parallèle [duo éléctro-psychédélique formé en compagnie du saxophoniste Etienne Jaumet] ?

Oui, il a un nouvel album qui est prêt, mais il doit d’abord attendre la fin de notre tournée avant de le publier, histoire de ne pas être au four et au moulin, comme on dit…  

Juste avant de partir en tournée, vous étiez d’ailleurs tous les deux en studio. Un nouvel album d’Herman Dune à prévoir bientôt ?

Oui, on est sorti de studio avant-hier. On y était pour enregistrer ce qui, au début, devait être seulement une bande originale de film et qui est devenu, au fur et à mesure, un album. Le réalisateur nous demandait de plus en plus de morceaux et on enregistré de quoi remplir un nouvel album, oui.

À la manière de Dylan et de ses « Bootleg Series », est-ce que tu aimerais un jour publier un catalogue exhaustif de tes anciens morceaux ?

Pour l’instant, j’aime surtout publier mes morceaux sur mon blog [http://strangemoosic.tumblr.com/], j’aime bien ce format de diffusion épisodique. Je suis en train de me demander si je vais pas sortir mes reprises de « Shot of Love » sur BandCamp ou de manière un peu plus officielle, je suis en train d’y réfléchir en tout cas. J’ai plein d’enregistrements un peu partout alors il est possible que je finisse par les ranger dans une compilation. Mais je préfère pour l’instant me consacrer aux nouveaux albums plutôt qu’au passé.

Et c’est le soir-même que l’on retrouve Ya Ya sur scène, en compagnie de Néman et du bassiste Ben Pleng (également membre de Yeti Lane). Le grand monsieur qui sort de sa sieste a désormais l’allure d’un musicien déterminé à explorer chaque recoin de ses chansons, en tapant du pied et en saturant le son de sa guitare électrique. Pas de setlist, c’est au reste du groupe de le suivre et de rendre vivant ce concert où des textes souvent lumineux sont magnifiés par une énergie incroyable, une vraie passion de jouer. Il fallait au moins ça pour convaincre le public angevin, toujours aussi immobile et qui a eu du mal à se remettre de l’incroyable Dick Turner, habituelle première partie du groupe, sorte de barde fantaisiste qui vomit avec candeur sa mélancolie à coups de boites à rythmes et de trombone.

Et comme prévu, les morceaux de “Strange Moosic” tiennent la route, que ce soit le single “Tell Me Something I Don’t Know” expédié joliment ou le superbe “The Rock”, dont les arpèges rappellent le “Boots of Spanish Leather” de Dylan. Ce dernier est d’ailleurs à l’honneur avec une reprise de notre morceau favori de “Shot of Love”, un “In the Summertime” chanté par Ya Ya lors de son interlude acoustique, où il rendra également hommage à Buddy Holly, avec un “Rave On” fougueux. Je me dis que Ya Ya a des airs de Dylan ce soir, la manière dont il s’accroche à sa guitare, dont il étire certaines syllabes, dont il revisite ses classiques (“I Wish That I Could See You Soon”) et semble regarder au loin quelque chose qui nous échappe, mais qu’il parvient à nous communiquer avec sa douce voix et ses mélodies évidentes.

Les concerts d’Herman Dune nous laissent toujours plein d’amour, plein d’espoir, prêt à affronter le printemps les cheveux dans le vent, sifflotant en réécoutant cette musique, étrange et familière à la fois.

Rejoignez-nous sur le 103fm mardi prochain, entre 19h et 21, pour prolonger le plaisir : deux heures consacrés à Herman Dune, avec des extraits de notre entretien avec Ya Ya, des inédits, des reprises et un tas de surprises.

Vendredi 30 décembre 2011 à 21:24

Suite et fin d'une rétrospective non exhaustive mais représentative des albums que j'ai le plus écouté cette année. 

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JEREMY JAY - Dream Diary
"Du glam pas pompeux, de la récup' qui sonne pas toc et un charme qui ne s'explique pas".
 J'écrivais ça quand je m'enthousiasmait en 2009 au sujet de "Slow Dance", l'album qui m'a fait découvrir ce grand dadais. Depuis, je ne m'en lasse pas, il m'accompagne partout. Chaque album sonne de la même façon, mais évolue dans un paysage différents. "Slow Dance", c'était les clubs enfumés tard la nuit, "Splash" c'était les flaques d'eaux et le ciel blanc d'automne et celui-ci, c'est le crépuscule où les synthés qui dégoulinent font l'effet d'un soleil qui se couche, où les guitares à la Pixies sont comme des vagues de mélancolie. Où même mes métaphores les plus téléphonées ne parviendront pas à décrire les petites joies que sont chacune de ces étonnantes chansons. 
Chanson favorite : "The Man On The Mountain"


JOSEPH ARTHUR - The Graduation Ceremony
Certains vont m'accuser de verser dans le mainstream et je leur dirais "la musique est bonne, si tu l'avais écouter, tu saurais que la musique est bonne".
 Et ceux qui sont déjà en deuil de R.E.M. vont se régaler comme moi (même si je suis pas en deuil de R.E.M.) des mélodies du toujours inspiré Joseph Arthur, qu'on avait pas revu depuis 2006 en solo. Une section de cordes, des couches de guitares et de réverbs, un écho sur la voix, Jim Ketlner à la batterie (qui a accompagné Dylan et Lennon, entre autres) et beaucoup de poésie. De l'americana amplement produit et émouvant quand, comme moi, on a le coeur d'une adolescente. J'aurais pu mettre le Coldplay à la place, mais je l'ai pas encore l'écouter. N'empêche, je suis curieux...
Chanson favorite : "Midwest"


KIM NOVAK - The Golden Mean
La Normandie est un vivier incroyable de talents.
 J'ai connu Hugo, guitariste du groupe, lors d'un chouette été et lors d'escapades dans sa verte contrée et je l'ai vu, lui et ses potes musiciens, s'épanouir et grandir ensemble, rejoindre différents projets et transformer en or tout ce qu'ils ont touchés. Les Chocolate Donuts, les Lanskies, autant de groupe à aimer et à suivre alors que leur avenir prend forme et que l'on peut les soutenir avec enthousiasme. Kim Novak, eux, n'ont plus besoin de soutien. Ils ont déjà atteint des sommets de maîtrise et ont sorti cette année un nouvel album qui approche de la perfection. Il faut l'écouter pour le croire. Oui, c'est un groupe normand qui écrit ces modèles d'écriture et de composition pop aussi mélancoliques que sautillantes, en dépassant ceux qui pourraient les avoir influencer (que ce soit The National ou les Modern Lovers, j'en sais trop rien). Merci à toi et ta bande Hugo, je suis fier de ce que vous fabriquez tout là-haut et je suis ravi d'écouter "The Golden Mean" tous les jours où il pleut aussi fort que chez vous. 
Chanson favorite : "Montego Bay"


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THE PAINS OF BEING PURE AT HEART - Belong
Belle & Sebastian versus The Jesus & Mary Chain = The Pains Of Being Pure At Heart. Autant de noms de groupes inventifs pour une musique qui mêle saturation et rêverie, de la dream-pop qui secoue encore plus sur ce deuxième album, bénéficiant d'un son plus large et peut-être, visant un public plus important. On navigue toujours entre tension et émotion, entre rock et pop et on tape du pied en souriant bêtement. 
Chanson favorite : "My Terrible Friend" (un plagiat jouissif des Cure)

REAL ESTATE - Days
C'est grâce à une amie américaine, rencontrée l'été dernier à Barcelone, que j'ai découvert le groupe.
 Elle les avait vu en concert chez eux, dans le New Jersey et après écoute répétés sur le balcon au soleil, ils m'ont charmés. "Days" est un second album qui, avec sa pop à guitares et ses textes rêveurs, devrait avec le temps s'incruster de la même manière dans mon esprit : sur le balcon au soleil. C'est l'album parfait pour y coller ses souvenirs, ses moments de joie, de tristesse et y revenir selon l'humeur. 
Chanson favorite : "Kinder Blumen"

THE STRANGE BOYS - Live Music
J'avais déjà passé un bon moment en compagnie de l'album précédent, mais je ne m'attendais pas à accrocher autant à celui-ci. Dès que je l'ai reçu (c'est chouette d'être animateur radio, on a de beaux cadeaux), je l'ai adopté et il n'a plus quitté ma platine pendant deux semaines. Tournant en boucle pendant la Toussaint. Fini l'agitation et la furie, les garçons étranges font maintenant de l'alternative country leur nouveau terrain de jeu.  L'album s'ouvre sur quelques notes à la McCartney période Wings et se termine sur Neil Young période "Dead Man". Entre les deux,  c'est frais, naïf, ludique, plein de bons sentiments et de mélodies évidentes. Alors même si certains n'attendaient pas ça du groupe, moi c'est justement tout ce que j'attends d'un album réussi. Et puis la voix a un charme incroyable. 
Chanson favorite : "Doueh" (un plagiat formidable des Waves Pictures)

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THE STROKES - Angles
Je crois que j'en ai suffisamment parler, non ? Il vous suffit d'aller chercher le groupe de Casablancas dans mes archives et vous trouverez deux ou trois plaidoyers en faveur de ce quatrième album bancal mais que j'ai savouré comme on savoure le retour d'un vieil ami. Encore aujourd'hui, écoutez le single me ramène directement à ces premiers jours de printemps. Merci Nick Valensi. Allez, un lien quand même : http://dylanesque.cowblog.fr/183-between-love-hate-3095596.html
Chanson : "Games"

TOM WAITS - Bad As Me
C'est vraiment en 2011 que je me suis plongé dans l'oeuvre de Tom Waits. Le moment qu'il a choisi pour nous offrir un nouvel album studio qui rend le tableau encore plus complexe et étourdissant. J'ai pas encore fait le tour de "Bad As Me" mais à chaque fois que je l'écoute, mon esprit part dans tous les sens, et bien souvent dans un passé en sépia où je navigue à travers des formes étranges et de la brume. "Bad As Me" est magique, fun et comme le prouve mon cas, une porte d'entrée fascinante pour un artiste qui ne l'est pas moins. 
Chanson favorite : "Back In The Crowd"

THE WAR ON DRUGS - Slave Ambiant
À force de parler de pop moderne dans le magazine MAGIC (que je lis assez régulièrement), je me suis demandé ce que c'était la pop moderne. Et c'est ce deuxième album du groupe de Philadelphie qui m'en a donné la définition la plus marquante. Sans que je demande rien, juste par hasard, au plaisir d'une lecture aléatoire alors que je préparais mon émission de radio. La voix d'abord m'a sauté aux oreilles, lancinante, presque dylanesque par moments (DYLANESQUE !), et puis la musique, chaleureuse et enfumée, qui quand on l'écoute au casque, vous plonge dans un cocon dont on ne veut plus jamais sortir. C'est de la pop moderne parce qu'on a l'impression d'avoir entendu ces morceaux milles fois avant et que pourtant, ils nous encourage à faire des bonds en avant. 
Chanson favorite : "Black Water Falls"

YUCK - Yuck
Je vous disais en guise d'introduction à ce bilan que j'avais surtout passé l'année à redécouvrir la scène alternative des années 90, entre Dinosaur Jr, les Pixies en passant par Luna et Teenage Fanclub.
 Et bien cet album semble tout droit sorti de cette période bénite. La même urgence, les mêmes tourments adolescents noyés sous une tonne de saturations, des saillies héroïques qui font bondir de joie et de fureur. Du revival pur et dur et incroyablement émouvant. Pas une minute de trop dans ce brouillon parfait. 
Chanson favorite : "The Wall"

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Si j'ai boudé Beirut et les Frères Gallagher cette année, j'ai également envie de citer Wild Flag et The Men, mes seule véritables passions rock'n'roll du moment, White Denim et Timber Timbre qui me charment tout doucement, Noah & The Whale qui ont sorti un troisième album moins bon mais honnête et que j'ai beaucoup écouté au printemps, Marissa Nadler, Atlas Sound et Kurt Vile qui sont parvenus à me bouleverser au moins le temps d'une chanson, les Black Keys et les Kills qui ont sortis des nouveautés sympas à passer en soirée avec des amis, Jonathan Wilson dont l'album est une montagne que je suis toujours en train d'escalader, Gorillaz qui a signé le meilleur bruit de fond de l'année (et c'est un compliment, vraiment), Paul Simon qui ne vieillit donc jamais, le charme de Feist qui commence enfin à m'ensorceler après de nombreuses écoutes, Blitzen Trapper et Akron/Family dans la catégorie "albums que j'aurais plus écouter si j'avais mon permis et la possibilité de rouler sans arrêt sur de longues routes de campagne", et
PJ Harvey pour "In The Dark Places", la plus belle chanson de l'année. 

Jeudi 29 décembre 2011 à 21:02

Comme d'habitude, j'ai écouté beaucoup de musique mais pas forcément des trucs nouveaux. En plus de mes heures plongés dans l'oeuvre du Zim, j'ai fait immersion dans celle de Neil Young et Tom Waits et dans la pop des nineties. Malgré tout, le choix n'a pas été facile pour ce bilan 2011, parce que même si je n'ai pas écouté autant de nouveautés que je l'aurais voulu, il y a pas mal que j'ai chéris. Certaines ont tournés à l'obsession éphémère, d'autres ont mis du temps avant de m'atteindre. Alors voilà ce que j'ai retenu, en vrac parce que de toute façon, c'est le bordel dans ma discothèque. Un top 20 sans ordre particulier, la suite, demain. 

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ALELA DIANE - Alela Diane & Wild Divine
Franchement, j'avais écouté d'une oreille discrète avant. Les deux premiers albums m'ont peu attirés, je les avais naïvement rangés dans la catégorie "revival folk" qui me fatiguait bien trop souvent à l'époque. Maintenant, je suis grand et j'ai le droit d'aller voir des concerts et de rencontrer des artistes, youpi. Discuter avec Alela et la voir jouer sa country-folk vachement bien écrite et poignante en compagnie de toute sa famille m'a laissé un excellent souvenir et je me suis replongé dans ce troisième album dès le lendemain, pour ne plus jamais vraiment le lâcher. Il a illuminé mon automne. Un mélange entre Karen Dalton et Lucinda Williams qui s'écoute facilement mais ne s'essouffle toujours pas. Vous pouvez relire mon interview ici : 
http://dylanesque.cowblog.fr/199-light-a-candle-in-the-dark-3146027.html 
Chanson favorite : "Long Way Down"

ALEXANDER - Alexander
À défaut de pondre la suite de l'inoubliable aventure sous le pseudonyme Edward Sharpe et ses Magnetic Zeroes, l'ami Alex Ebert nous a offert cette année un album solo qui m'a fait un effet fou dès la première écoute et qui est haut la main celui que j'ai le plus écouté. C'était parfait pour le printemps, pour l'été et l'automne et ça risque de me réconforter en hiver. C'est de la pop ensoleillée, inventive, pleines d'harmonies chaudes et qui se fredonnent avec joie. Des émotions très fortes avec des mots très simples. Oui de la pop quoi. Plutôt que de me prendre la tête à essayer de ressentir quoi que ce soit en écoutant Bon Iver, j'ai pris mon pied sur ça. 
Chanson favorite : "Remember Our Heart"  

DAWES - Nothing Is Wrong
Beaucoup de mes héros de l'americana ont sortis des albums cette année : Okkervil River, Josh Rouse, Low, Vetiver, Wilco, The Walkmen... Mais aucun ne m'a touché autant que les nouvelles pousses. Comme pour Alela Diane, voici un disque de country-folk bien produit, que j'écoute comme si j'étais au volant sur une route lumineuse (ou enneigé, ça marche aussi). De beaux paysages lyriques, chaleureux, avec des tourments quasi-adolescents auxquels on s'identifie facilement. Et un final euphorisant. C'est aussi ambitieux que ça sonne simple. 
Chanson favorite : "A Little Bit Of Everything

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THE DODOS - No Color
Le duo de San Francisco n'a jamais manqué de m'éblouir. Surtout lorsqu'ils sont en bonne compagnie : Neko Case sublime "Sleep" qui aurait pu être un gros bordel mais sonne comme le paradis. Rien ne sonne comme autre chose mais tout sonne joli. Ils ont un talent fou pour rendre audibles et attachantes leurs expérimentations sonores, imaginer des morceaux de folk brutes qui caressent dans le sens du poil et une belle voix plaintive posé sur des riffs mélancoliques, ça manque rarement de me faire fondre. Heureusement que j'ai le sens de la formule pour vous vendre le truc, parce que c'est pas avec leurs photos promos à la con (voir ci-dessus) qu'ils arriveront à vous faire grimper aux murs. 
Chanson favorite : "When Will You Go" 

THE FEELIES - Here Before
2011 a vu beaucoup de reformations et deux d'entre elles m'ont vraiment marquées. D'abord, celle des Feelies, qui n'ont rien perdus de leur charme vingt ans après et signe des retrouvailles à base d'accords évidents et de batterie tribale parsemé d'une voix doucement nostalgique. Encore une fois, ce sont les seuls ingrédients qu'il me faut pour savourer la pop (ou le rock, ou le post-punk, appelez ça comme vous voulez), et c'est jouissif quand un groupe arrive à la faire sonner aussi bien en 1979 qu'en 2011. 
Chanson favorite : "Again Today"

GIRLS - Father, Son, Holy Ghost
Vous commencez à le comprendre, ce que j'ai cherché et chéri en 2011, c'est le sens de la mélodie, des harmonies et du plaisir immédiat. Et c'est ce que m'a offert le deuxième album de Girls, avec une touche d'émotion supplémentaire et bien plus de sincérité que sur l'essai précédent. L'influences des Beach Boys est clairement revendiqué et c'est en effet comme si on venait de déterrer un trésor enterré dans le sable californien depuis 66. La saturation est plus forte mais la tristesse est la même. C'est magique. 
Chanson favorite : "Magic"

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HERMAN DUNE - Strange Moosic
Plus riche que le précédent, cet album est arrivé avec le printemps et m'a sorti de l'hiver avec un grand sourire. Encore un plaisir immédiat, celui d'entendre la douce voix de David-Ivar, de retrouver ses ritournelles et ses riffs délicats, de savourer la production soyeuse qui fait la part belle aux percussions de Neman et à de nouvelles sonorités. Encore plus pop, encore plus doux et ensoleillé, toujours aussi attachant. Hâte de voir ce que cela donnera en concert mais l'énergie et la beauté qui émane de l'album me satisfait. 
Chanson favorite : "Just Like Summer"

IRON & WINE - Kiss Each Other Clean
Alors que ses ritournelles folks avaient sur moi un effet neurasthénique, Samuel Beem a décidé d'enrober le tout sous des allures grandiloquentes qui m'ont séduites, voulant comme il le dit lui-même retrouver le son des grandes ballades pop qu'il entendait à la radio dans les années 70. Encore un artiste qui m'a invité sur les grandes routes américaines à grand renfort de mélancolie et de romantisme sucré, décidément une bonne formule en ce qui me concerne. 
Chanson favorite : "Half Moon"

THE JAYHAWKS - Mockingbird Time
C'est pas aussi moderne et inventif que Tune-Yards, Craft Spells ou Brown Recluse (je les citent parce que j'aiment bien aussi ce qu'ils font), mais c'est, pour moi, bien plus chouette à écouter en boucle toute l'année. Oui, le deuxième retour qui m'a enthousiasmé, c'est celui des Jayhawks. Gary Louris et Mark Olson ne se sont pas reposés sur leur lauriers depuis 1995 et se replongent dans leur exploration de l'alternative-country sans fioritures ou prétention. On a parfois l'impression d'écouter un album oublié de Neil Young où les ballades acoustiques se succèdent aux tourments électriques et toute la musique américaine est revisitée. Et puisque que Jeff Tweedy et sa bande sont partis dans de nouvelles stratosphères sans que je n'ai eu trop envie de les suivre, les Jayhawks ont repris du service pile au bon moment. 
Chanson favorite : "Tiny Arrows"

JEFFREY LEWIS - A Turn In The Dream-Songs
Il m'avait manqué, Jeffrey. L'auteur des textes les plus sensibles et touchants de la décennie a un nouveau tour dans son sac, un album dans la continuité des précédents, mélange de ballades bouleversantes fabriqués avec trois fois rien et d'expérimentations aussi bancales qu'entraînantes, avec toujours cette voix d'ado qui découvre le monde, entouré cette fois de choeurs adorables. C'est drôle, émouvant et très riche. En attendant qu'Adam Green redonne des signes de vie et que Turner Cody sorte autre chose que des compilations (excellentes cela dit mais mince en inédits), Jeffrey Lewis reprend le devant de la scène et signe sa meilleure collections de chansons. 
Chanson favorite : "Krongu Green Slime"

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Dimanche 23 octobre 2011 à 16:36

Note : Voici une interview que j'ai pu réalisé avec l'aide de Radio Campus Angers, la radio étudiante qui me permet depuis 2008 de partager encore plus de musique avec mes deux émissions MellowYellow! (pop-folk-country-blues) et BangBangRock&Roll!, diffusés le mardi entre 19h et 21h. Pour écouter les émissions en direct, retrouvez les podcasts et les playlists ou tout simplement en savoir plus sur Radio Campus Angers, rendez-vous sur nos pages Facebook ou sur le site officiel : http://www.radiocampusangers.com

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Loin de Portland, Alela Diane se retrouvait vendredi dernier dans la grisaille angevine. Mais avec son père et son mari à ses côtés et un public conquis d’avance par ses ritournelles folk, l’adorable chanteuse n’a pas trop le mal du pays. C’est autour d’un thé qu’elle m’a parlé en toute simplicité de son dernier album (“Wild Divine”, sorti au printemps dernier), de sa tournée, de la musique qu’elle aime faire et celle qu’elle aimerait faire.

Light a Candle in the Dark / “Mon dernier album est un mélange de noirceur et d’optimisme. J’allume des bougies dans l’obscurité. J’observe des choses parfois très sombres mais je retrouve toujours l’espoir. C’est ce sentiment que j’ai voulu transmettre à mes nouvelles chansons. »

En Famille / « Ecrire des chansons et les jouer sur scène est quelque chose de très intime et ça me semble naturel de partager cette intimité avec les personnes qui me sont proches. Mon mari et mon père sont avec moi sur scène, depuis le début, et c’est avec eux que j’aime travailler. »

American Music / « La musique américaine, en général, fait partie de qui je suis. Mais si je respecte des artistes comme Leonard Cohen, Joni Mitchell ou Bob Dylan, ils ne m’influencent pas directement. Ce que j’écris est vraiment personnel et s’il est possible que certains thèmes ou certaines sonorités font écho à l’héritage de la musique américaine, c’est souvent de manière inconsciente. »

Heartless Highway / « J’ai du mal à écrire quoi que ce soit quand je suis chez moi parce qu’il y a tant de distractions : j’ai des choses à faire, des amis à voir, du ménage… Quand je voyage, c’est une suite d’hôtels, de routes et comme je ne suis pas émotionnellement attaché à ces endroits, c’est l’occasion de faire un travail d’introspection et de repenser à ma maison avec une nouvelle perspective, avec distance. C’est plus facile de parler de chez soi quand on est loin de chez soi.

Country Music / « Mon dernier album a des sonorités plus country, ce que je n’avais même pas réalisé en l’enregistrant. La production, la pedal-steel, le jeu de guitare de mon père… Mais je ne me vois pas aller à Nashville enregistrer un véritable album country dans le sens pur du terme. Ce serait prendre une direction trop évidente, trop simple, fainéante. J’aime l’ambiance de cet album mais la prochaine fois, je veux faire quelque chose de nouveau, surprendre. »

Et Maintenant ? / « Je traverse des moments qui me font grandir, changer de personnalité et je pense que je vais essayer de travailler sur cette évolution dans mes prochaines chansons. J’ai pas mal écris sur cette tournée et j’espère avoir le temps de trouver des mélodies et enregistrer en rentrant chez moi. Je veux vraiment faire quelque de différent. Pas un changement extrême, pas de musique électronique ou de disco, mais une évolution. Je veux me concentrer plus sur les mots, sur ma voix, être le plus honnête possible. C’est ce qui est important au final, la sincérité.

Et ce qui fera la force de sa performance, c’est justement cette sincérité. Au milieu de la grande scène du Chabada, entouré par son mari et son père à la guitare, plongé dans une cotonneuse ambiance country, Alela Diane a offert un concert chaleureux. Jamais trop calme, jamais trop brusque, tout en nuances et traversés de pures moments d’émotions. Et cette voix… Sauvage et divine.

Dimanche 22 mai 2011 à 0:04

TIME MACHINE INTERVIEW with the JIM JONES REVUE !

 

Note : Voici une interview que j'ai pu réalisé avec l'aide de Radio Campus Angers, la radio étudiante qui me permet depuis 2008 de partager encore plus de musique avec mes deux émissions MellowYellow! (pop-folk-country-blues) et BangBangRock&Roll!, diffusés le mardi entre 19h et 21h. Pour écouter les émissions en direct, retrouvez les podcasts et les playlists ou tout simplement en savoir plus sur Radio Campus Angers, rendez-vous sur nos pages Facebook ou sur le site officiel : http://www.radiocampusangers.com

Le temps est lourd et le Chabada est plein de décharges électriques lorsque je débarque, mercredi, alors que The Jim Jones Revue effectue ses balances. La sueur leur coule du front et il est temps de faire une pause thé pour le chanteur Jim Jones et son guitariste Rupert Orton, deux anglais élégants qui s’effondrent dans leur loge.

Leur tournée a commencé en janvier, ça fait cinq mois qu’ils sont sur la route et c’est la dernière date, ce soir, à Angers. Rien de spécial n’est prévue pour fêter l’événement, si ce n’est envoyer la sauce, comme d’habitude. « Et boire jusqu’à ce qu’on s’effondre » précise Rupert, qui tourne pour l’instant à la tisane.

Après avoir participé aux prémices de la scène rock alternative avec le groupe Thee Hypnotics, entre 1989 et 1994, après avoir accompagné les Black Moses pendant un bout de route, Jim rencontre Rupert en 2007 et décide de se lancer dans cette nouvelle aventure. Tout commence en France, où le groupe connaît son premier succès d’estime en enchaînant les festivals. Depuis, déjà deux albums sont parus, ainsi qu’une compilation de singles et une collaboration avec Jim Sclavunos, producteur de Nick Cave et proche de Sonic Youth. Un bon début pour un groupe d’acharnés, qui travaillent sans répit pour raviver la flamme rock and roll originelle en la mêlant à des influences punk rock. Avec un chanteur à la voix digne de Howlin’ Wolf, des guitares saturés, un batteur fou furieux et un pianiste qui n’a rien à envier à Jerry Lee Lewis, la formation assure forcément le spectacle autant sur disque que sur scène.

En attendant de voir ce que ça donne face au public angevin, j’ai donc pu partager le thé avec le duo formateur. Ensemble, on a remonté le temps pour revenir aux origines. Un entretien qui, à l’image du groupe, convoque les fantômes d’Elvis et de Little Richard tout en évoquant Gun Club, Ramones et les Stooges.

BBR&R : 1956. Elvis chante “Hound Dog” à la television, Jerry Lee Lewis enregistre de nouveaux tubes aux Sun Studios, Chuck Berry figure en bonne place au Bilboard Top 100 et Muddy Waters va débarquer au Royaume-Uni. Imaginez être téléporté à cette époque et devenir vous aussi des pionniers du rock and roll. Qu’aurez été votre contribution ?

Rupert Orton (guitare) : J’ai du mal à me projeter parce que tu vois, j’ai dans la tête tout ce qui est arrivé après les années cinquante et si on se pointait en 1956, on aurait pas toute l’influence des années suivantes et ce serait dommage. En tout cas à l’époque, l’ambiance devait être juste formidable ! Avoir la chance de voir Little Richard sur scène en 1956, ça devait être comme voir un alien débarquer !

Jim Jones : Ouais d’ailleurs, je pense que si on débarquait en 1956, on passerait plus de temps à aller voir des concerts qu’à en faire. On serait dans la foule, en plein délire !

BBR&R : Et si vous n’aviez le temps de voir qu’un seul groupe, ce serait lequel ?

Rupert Orton : Parmi tous ceux que t’a mentionné ? Putain, dur…

Jim Jones : Little Richard.

Rupert Orton : Probablement Elvis, j’imagine…

 

***

BBR&R : En parlant d’Elvis, on va sauter jusqu’en 1976, un an avant sa mort. La scène rock vieillit et au moins de juillet, à Londres, les Ramones jouent à guichets fermés. Juste après le concert, les membres des Clash et des Sex Pistols viennent taper à la porte de leurs loges pour les rencontrer. Vous étiez encore jeune mais est-ce que le mouvement punk vous a marqué, est-ce que c’était l’une de vos premières influences ?

Rupert Orton : Oui, carrément. Les Ramones sont l’un des premiers groupes que j’ai vu. Pas dès 1976, j’étais trop jeune, mais plus tard. Ils m’ont beaucoup marqués et je suis retourné les voir le plus de fois possible ensuite.

Jim Jones : Ma première influence, ce fut directement le rock and roll. Elvis, Little Richard, c’est en les écoutant que je me suis dit pour la première fois que j’aimais la musique.

 

BBR&R : 1994. Jim, tu es le chanteur du groupe Thee Hypnotics qui se sépare après trois albums. Tu fais alors partie de la scène garage alternative avec, par exemple, le Jon Spencer Blues Explosion. Tu peux nous en dire plus sur cette expérience ?

Jim Jones : 1994. Je suis même pas sûr si je m’en souviens vraiment, ça remonte à loin. Thee Hypnotics, c’était toute ma vie à l’époque. J’étais seulement un adolescent et l’instant d’après, me voilà dans un groupe en tournée. J’ai tout appris sur la route, lors des concerts, c’était mes années d’apprentissage. Parfois c’était génial, parfois c’était à chier, c’était tout à la fois. C’était la seule chose que je connaissais : faire de la musique.

***

BBR&R : Nous voilà donc en 2011. The Jim Jones Revue a publié deux albums dont le dernier en date, « Burning Your House Down » a été produit par Jim Sclavunos (Nick Cave & The Bad Seeds, Grinderman, Sonic Youth). J’imagine que c’est vraiment deux expériences différentes d’enregistrer en studio et de jouer sur scène ?

Jim Jones : Le studio et la scène, c’est deux animaux qu’il faut approcher différemment, qu’il faut savoir dompter. Quand t’enregistres, tu capture une performance mais quand tu es sur scène, les gens écoutent avec leurs yeux, tu dois te donner encore plus à fond. Devant un public, tu vois directement leur réaction, ce qui fonctionne, ce qui fonctionne pas. En studio, tu essaye de capturer quelque chose qui pourrait saisir leur imagination.

Rupert Orton : On enregistre live donc au final, c’est essentiellement le même son. N’empêche qu’on se lâche plus en public.

***

BBR&R : Parlons du futur. Si vous vous projetez, vous atterrissez où ? Toujours sur scène, toujours la même bonne vieille formule ?

Jim Jones : Pour l’instant, on pense surtout aux vacances. On est sur la route depuis cinq mois, c’est notre dernière date ce soir et après, on sera en vacances. Histoire de recharger nos batteries avant d’écrire un nouvel album. Ce sera le troisième en quatre ans et c’est bien de bosser à ce rythme là, d’aller à toute vitesse et de voir ce qui se passe. Je suis très excité de voir ce que ça va donner en tout cas.

Rupert Orton : Et on retourne sur la route cet été, on fait plusieurs festivals. Rock En Seine, Guitare en Scène. On va y jouer avec nos héros, les MC5 et les Stooges. Et puis si tout va bien, le nouvel album sortira début 2012.

Jim Jones : Pour l’instant, on se projette pas plus loin que ça…

BBR&R : Parmi vos héros, il y a aussi Jerry Lee Lewis et Chuck Berry, qui sont encore vivants. Ca donnerait quoi si vous pouviez partager la scène avec eux ?

Rupert Orton : On a failli jouer avec Chuck Berry ! C’était y a pas longtemps, ce devait être une tournée entière en sa compagnie, mais putain, il a annulé à la dernière minute. On était fous de joie alors imagine un peu la déception…

Jim Jones : Faudrait qu’on demande à Jerry Lee Lewis mais il est plus aussi bon…

***

BBR&R : Et un groupe ou artiste actuel avec lequel vous aimeriez collaborer ?

Jim Jones : Jack White, André 3000…

Rupert Orton : Jon Spencer.

Jim Jones : Jon Spencer, bien sûr. On a déjà parlé de tourner avec lui mais on arrive pas à trouver le bon timing, on est tous les deux très occupés.

Rupert Orton : Josh Homme !

Jim Jones : Et Tom Waits. Ce serait juste génial de pouvoir faire n’importe quoi avec lui, rien que rester dans son ombre, pouvoir l’approcher. En tout cas, j’aimerais bien collaborer avec quelqu’un d’autre, pour écrire, pour la production. Tout est possible.

Rupert Orton : Et c’est aussi très sympa de bosser avec de jeunes groupes.

Jim Jones : Y a un français que j’aime beaucoup, c’est Don Cavalli. Faut écouter Don Cavalli, sérieusement.

***

BBR&R : Jim, tu as un voix géniale. Tu parlais de Tom Waits, tout à l’heure, mais on pense aussi à Howlin’ Wolf quand on t’entends hurler. D’après toi, c’est quoi la plus grande voix du rock and roll ? C’est quoi la première vois qui t’a donné envie de chanter ?

Jim Jones : Little Richard, probablement. Il y a tout dans cette voix.

Rupert Orton : Elvis a une putain de voix aussi. Et puis Otis Redding.

Jim Jones : Avant de commencer à chanter, j’ai beaucoup joué de guitare. Et puis après, j’ai fini par gueule par-dessus mes albums des Stooges !

BBR&R : Donc nous, on a une émission de radio et toutes les semaines, on met en avant un album culte, oublié ou qui fait l’actualité. Et on aimerait bien que vous choisissiez pour nous celui de la prochaine émission.

Rupert Orton : « Fire Of Love » des Gun Club. J’ai toujours adore cet album parce que c’est le meilleur mélange possible entre blues et punk-rock. Et moi, je connaissais rien au blues avant d’écouter Gun Club, ils m’ont vraiment ouvert tout un monde : Son House, Robert Johnson.

Jim Jones : Pareil pour moi. Je me souviens que « Jack On Fire » est la première chanson de Gun Club que j’ai entendu. C’est marrant parce qu’on se connait pas depuis si longtemps Rupert et moi mais on a découvert qu’on écoutait exactement la même chose quand on était ados. On allait voir les mêmes concerts.

BBR&R : Un peu comme Mick Jagger et Keith Richards qui se rencontrent dans un bus et découvrent qu’ils sont tous les deux fans de Muddy Waters…

Jim Jones : Voilà ! Moi, j’habitais à quelques kilomètres de Londres et avec un pote, on achetait un fanzine qui faisait toujours sa une avec Gun Club, c’est comme ça que j’ai découvert le groupe. Probablement l’un de mes groupes favoris, encore aujourd’hui.

***

BBR&R : Comment se fait-il que le blues, qui est à l’origine une musique américaine, a eu autant d’influence sur la scène britannique depuis les années soixante ?

Jim Jones : Quand t’es jeune, tu te dis pas direct que tu veux écouter de la vieille musique, des trucs poussiéreux comme le Blues du Delta. Mais tu tombes sur un groupe comme les Stones ou Gun Club qui réinterprète ce son là et ça t’ouvre les portes. Tu te dis « tiens, d’où ça vient tous ces accords ? » et tu remontes à Chuck Berry, Slim Harpo, Robert Johnson, jusqu’à l’origine de la source.

BBR&R : Et vous pourriez être, vous aussi, une porte d’entrée vers les origines du rock and roll. Peut-être qu’après le concert de ce soir, des jeunes vont découvrir Little Richard et Jerry Lee Lewis…

Jim Jones : Je l’espère, sincèrement. Si on peut permettre à une ou deux personnes de découvrir d’autres groupes, on aura accompli notre mission.

Rupert Orton : Si tu prends du plaisir à la faire, tu vas forcément inspirer quelqu’un. Quand es Ramones ont fait leur première tournée aux Etats-Unis, ils ont enchaînés toutes les villes et y avait jamais grand monde dans la salle. Mais dans chaque ville où ils foutaient les pieds, un groupe allait naître. Les Dead Kennedys, Black Flag, par exemple. C’est le pouvoir de la musique et on est heureux de pouvoir participer à ça…

Une poignée de main vigoureuse et les deux acolytes partent découvrir la cuisine du Chabada. Histoire de bien charger la batterie avant de tout faire exploser ce soir, sur scène, lors d’un concert d’anthologie. Angers n’avait pas connu de moment aussi rock and roll depuis bien longtemps et malgré un public majoritairement statique, Jim Jones et sa troupe auront marqués les esprits et peut-être même inspiré des vocations.

Mardi prochain, à partir de 21h, BangBang Rock&Roll vous proposera une émission consacrée à tous les groupes évoqués par Jim et Rupert dans cet entretien. On commencera avec un compte rendu de leur concert, puis on remontera à la source en partant de Gun Club pour aller jusqu’à Robert Johnson, en passant par les Stooges, le Jon Spencer Blues Explosion et Elvis, bien entendu.

Mercredi 23 mars 2011 à 1:44

Juste une note pour en finir avec "Angles". Comme on pouvait s'y attendre, j'ai lu beaucoup de mauvaises critiques sur l'album. Mais genre des trucs assez violents. Comme quoi les Strokes, c'est des feignants, des branleurs, ils se foutent de notre gueule, l'album est trop court, pas assez de rifs, trop de solo, Julian est pourri gâté. Bref, toujours la même chose depuis "Room On Fire". L'album est écouté une ou deux fois et détruit. Et l'on retrouve toujours les mêmes attaques, plus sur la conception du disque que sur son contenu. Radiohead connaît ça aussi. Un album, ça s'écoute et ça se vit, il faut lui laisser le temps de faire son effet et de devenir une partie de ta vie ou pas. 

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C'est la manière dont je conçois la musique. C'est très personnelle et j'ai du mal à intellectualiser des chansons que j'ai à peine eu le temps de découvrir. Alors bien sûr, j'ai moi-même écrit une critique de "Angles". Mais, comme je l'ai précisé, c'est ouvertement des sentiments à chaud. Si ça se trouve, je l'écoute plus dans une semaine. Si ça se trouve, il va pas me laisser tomber et me rappellera toujours le printemps 2011. Je lui associerais toujours des souvenirs de renouveau, d'espoir. 

Déjà, rien qu'en allant l'acheter aujourd'hui, j'avais le coeur qui battait. Alors que je le connaissais déjà par coeur. Ce que je raconte ne vaut peut-être rien, parce que je suis un fan. Et y a rien de pire qu'un fan, c'est pas objectif un fan, un fan on peut lui donner du caca, il le mangera. Sauf qu'un fan, c'est pas encore blasé. 

"Alors, le nouveau Strokes, t'en penses quoi ?". "Pas terrible à ce qu'il paraît. M'a pas l'air terrible en tout cas". "Tu l'as écouté ?" "Euh... Une fois". 

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Qu'on soit bien clair, je ne cherche pas à défendre le groupe. Je veux juste que mon coeur de fan ne soit pas trop démoli. Je veux que vous l'entendiez battre sur ces pages et c'est la première et dernière fois que je chercherais ainsi à me justifier. Rien ne me fait autant de mal que le cynisme en ce moment. Et c'est ce qui surnage des réactions concernant les Strokes. Et je suis pas content. 

La chronique de l'ami Joris a au moins le mérite d'être originale, même si bien sûr, je ne suis pas d'accord. Son blog est très chouette en tout cas. Tenez, voici même un lien, sans rancune : 
http://tascapotosina.blogspot.com/

Ce genre de billet d'humeur, un tas de fans du monde entier ont du en écrire depuis la nuit des temps. J'aurais pu l'écrire bien avant, pour défendre Dylan ou n'importe laquelle de mes obsessions. Mais non, j'ai choisi les Strokes. Rien que pour cette nuit d'été 2006 où j'ai écouté Julian gueuler son mal-être dans de vieilles arènes romaines, quelque part à Lyon. Rien que pour les remercier d'avoir accompagné cette merveilleuse décennie où j'ai grandi. Parce que désormais, je ne grandirais plus. Et ils en sont en partie responsable. 

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Je suis rentré tard en écoutant "Life Is Simple In The Moonlight" et il y avait une belle grosse lune et ça m'a fait un bel effet. Et ça m'a suffit pour savoir que "Angles", je l'aimais déjà beaucoup. Que pour moi, il était réussi. Et qu'on va passer encore un moment ensemble. 

Dimanche 20 mars 2011 à 13:58

Tout le monde chante la même chanson depuis 10 ans. 10 ans déjà. Je n'étais qu'un gamin. Et depuis, j'ai bien grandi et le groupe new-yorkais aussi. Chacun a eu le droit à son aventure solo, la légèreté des débuts a laissé place à quelques nuages, à une longue pause et à un Julian Casablancas maussade mais toujours doté de la plus belle voix du rock&roll contemporain. Alors que tout le monde annonce leur prochaine séparation, les voilà de retour avec "Angles", un quatrième album qui aurait pu être l'occasion de dire merde à la concurrence, de reprendre son territoire et d'exploser avec panache. Au lieu de ça, c'est un melting-pot au goût étrange, qui va probablement diviser les adorateurs et conforter les détracteurs. Et moi, j'en pense quoi ? 

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L'album sort le jour du printemps. C'est un grand évènement dans mon quotidien maussade. "First Impressions of Earth" était sorti alors que j'entrais à peine au lycée. "Angles" paraît alors que ma scolarité est terminée. Oui, c'est un grand évènement, un signe. Et la bonne nouvelle, c'est que mon amour pour le groupe, mon groupe de jeunesse, est toujours aussi puissant. J'ai suivi de très près le moindre signe de vie des Strokes, j'ai adoré chacune de leur publication solo et quand l'attente était vraiment trop longue, je m'imaginais que "Phrazes For The Young", l'album de Casablancas, était le quatrième opus du groupe. Alors quand le nouveau single est tombé il y a un mois, j'ai explosé de joie. 

"Under Cover of Darkness", c'est un tube imparable, un mélange de fureur et de décontraction qui est la marque de fabrique des Strokes. Il suffit de regarder le clip, avec un Casablancas qui boude, puis s'agite, puis soupire, puis gueule dans son micro. Et les autres qui se déchaînent à l'arrière plan pour mener la chanson à bien, lui faire tenir la route. C'est tout un symbole, celui d'un groupe qui va mal, où le chanteur ne se sent plus concerné et demande à ce qu'on lui envoie les bandes à domicile pour qu'il pose sa voix loin de ses camarades, enfermés dans un studio californien. Cette ambiance triste n'empêche pas le single d'être une totale réussite. Avec un texte explicite où Casablancas nous fait part comme d'habitude de son dégoût des autres et de son envie de révolte. "Under Cover of Darkness", c'est "nous revoilà, on a changés, mais on a une putain de chanson pour nous faire pardonner". Je l'ai déjà écouté un millier de fois, je ne m'en lasse pas et j'ai des frissons à chaque fois que Julian gueule "Are you okay ?". Sauf qu'il s'agit d'un single trompeur, d'un leurre qui n'annonce en rien la couleur de l'album. 

Forcément, avec cinq types qui regardent pas du même côté, on a un résultat pas très homogène, limite inégal, voire inconsistant si on l'écoute d'une oreille distraite. Mais si l'on aime le groupe, il est forcément intéressant et ces dix chansons ne mettent pas si longtemps à convaincre. On est loin du retour aux sources promis et le son de l'album est plus dans la lignée de l'essai solo de Casablancas. Des synthés et une ambiance eighties rétro accompagnent la voix que l'on connaît bien et les guitares qui résonnent de manière si familières. Il est encore tôt pour émettre un jugement définitif sur la qualité de l'album, mais je suis déjà conquis. Ce n'était pourtant pas gagné. Comme pour la pochette flashy, on est perplexe au premier coup d'oeil avant d'y trouver un certain charme, une atmosphère coloré. 

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Le bal s'ouvre sur "Machu Picchu", avec des percussions et des bongos qui habillent de manière surprenante un rock énergique qui nous remet immédiatement dans le bain. Puis c'est le single, donc on a d'entrée de jeu un bon sentiment et beaucoup d'enthousiasme. "Two Kinds of Happiness" et "Taken For A Fool" sont deux morceaux efficaces, remplis de changements de rythme affolants, avec un Casablancas qui donne du sien et des riffs qui restent immédiatement en tête. On est en terrain connu et c'est plutôt jouissif. Les choses deviennent plus floues par la suite et il est certain que l'enchaînement "Games"/"Call Me Back" ne plairai pas à tout le monde. On y retrouve toute la mélancolie du leader des Strokes à travers deux complaintes désabusés, où l'univers est vide et tout est artificiel. Pourtant, ce n'est pas du toc, il y a une vraie émotion et toute la réussite de ces morceaux réside dans la voix de Casablancas. Si on aime pas son organe ou qu'on le trouve insipide, mieux vaut passer. Sinon, c'est vraiment hypnotisant, et les expérimentations du groupe en arrière fond ne sont pas vaines, elles donnent une nouvelle dimension aux Strokes, comme c'était le cas avec des morceaux comme "Ize Of the World" ou "Ask Me Anything" sur l'album précédent. Une dimension que j'affectionne et déjà je reprend en coeur les gémissements d'un chanteur mal dans sa peau et malade des autres. "Gratisfaction", c'est du Strokes léger, estival, avec une rythmique couillonne qui t'oblige à taper du pied. Rien de nouveau mais c'est appréciable de voir que la vieille formule fonctionne toujours. C'est une ballade qui conclut un album bien trop court, une ballade lancinante, élégante, qui aurait été quasi-parfaite sans le break maladroit qui l'alourdit à deux reprises. 

Les deux morceaux les plus faibles sont "You're So Right" et "Metabolism", froides et répétitives, qui manquent de fièvre et d'énergie. Mais je suis pourtant certain qu'elles finiront par me convaincre. Les chansons que j'écoutent en boucle aujourd'hui m'auront peut-être fatigué dans quelques mois et celles qui me laissent perplexes deviendront sans doute mes favorites. C'était le cas avec l'album précédent. Celui-ci n'a pas la même profondeur, pas la même ambition, mais il reste un beau retour. L'attente a peut-être été trop longue pour ne pas qu'on en veuille plus. Et on a raison d'en vouloir plus, on sait que le groupe est capable de mieux. Mais il y a plein de bonnes intentions. Plein de trouvailles. Il faut remercier Nick Valensi pour de beaux solos, Albert Hammond Jr qui a su donner de l'énergie là où certains morceaux auraient pu s'écrouler, Fab Moretti qui tient les clés de la décontraction et fait souffler la même fraîcheur sur "Call Me Back" qu'avec son groupe Little Joy et Nikolaï Fraiture qui arrondit les angles avec toujours la même discrétion. Et puis Julian, tu n'a jamais chanté aussi bien.

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Alors même si c'est le dernier effort des new-yorkais, on est loin d'un coup de fatigue. Il s'agit juste d'une tentative parfois flamboyante parfois maladroite de conclure dix ans de succès largement mérités. 


 

Mercredi 2 mars 2011 à 21:32

C’est assez magique pour moi, Noah & The Whale. Chacune de leur chanson me touche en plein cœur dès le première écoute. Et chaque album débarque toujours au bon moment dans ma vie. Le premier, alors que je découvrais les joies de l’amour et, quittant le lycée, j’embarquais pour de nouvelles aventures. Le second alors que je découvrais la douleur de l’amour et la longue reconstruction qui s’ensuit. Il m’avait vraiment bouleversé et me bouleverse encore. Et voici donc le troisième, arrivant presque avec le printemps, sous une pochette joliment vintage et qui par miracle, renouvelle l’exploit.

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« Life Is Life ». Derrière ce titre couillon, qui ouvre les festivités, il y a un clair message d’optimisme, une envie d’aller de l’avant. Exactement ce dont j’ai besoin en ce moment. Et la parfaite continuité de l’album précédent qui nous laissait entrevoir le beau temps à travers les nuages. Avec cette ouverture majestueuse, la chanson m’a tout suite file le sourire, ce qui m’était pas arrive depuis longtemps. Enfin pas de manière sincère en tout cas. « You used to be somebody and now you are someone else ». Mais oui, exactement ! Noah & The Whale, c’est comme les films de Noah Baumbach, ça me touché juste, là où il faut. « This new life can start ». Vraiment ? « And it feels like heaven ». Espérons le. Les choeurs m’entraînent dans un ocean d’allégresse et m’entraîne dans cet album coloré, loin de ma grisaille actuelle.

Le second morceau, « Tonight’s The Kind Of Night », nous raconte l’histoire d’un petit garçon plein de rêves qui quitte sa maison d’enfance et se laisse entraîner dans une nuit où les choses peuvent changer. Encore une fois, c’est simpliste mais ouvertement pop et lumineux. Les chœurs servaient à appuyer là où ça faisait mal dans l’album précédent alors qu’ici, ils renforcent la jovialité du propos.

« L.I.F.E.G.O.E.S.O.N » est l’impeccable single qui est une nouvelle variation sur le thème de l’album : aller de l’avant. Et il ressemble étrangement au « Lola » des Kinks, même narration, mélodie similaire qui a le pouvoir de vous rester en tête pour toujours et de manière immédiate. Un hymne à l’espoir et à la liberté efficace qui assume complètement sa naïveté, la proclame comme raison d’être et que je me vois bien écouter dès que j’ai besoin d’une dose de bonne humeur.  

Contrairement à ce qu’on pourrait croire, « Wild Thing » n’est pas une reprise du tube des Troggs. C’est une langoureuse ballade qui nous plonge dans la nuit, dans une ville où tout nous appartient. Et en l’écoutant, je me souviens d’une interview du groupe, qui expliquait le véritable concept de l’album. Parce que moi j’invite mes propres concepts mais le groupe a aussi son mot à dire. Ils ont voulu nous raconter une nuit sur la terre sous dix points de vue différents et chacune des dix chansons n’est en fait qu’une longue chanson kaléidoscopique. Rien de franchement original mais lorsqu’on écoute « Wild Thing », on comprend un peu mieux ce concept pompeux qui pour l’instant, fonctionne très bien. Même si je préfère m’approprier ces chansons à ma sauce.

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« Give It All Back » est puissante, limite de la pop pour stade. Avec des guitares qui ronronnent à l’arrière plan, un chant plein de ferveur, des percussions entraînantes, une mélodie ensoleillée. Elle me fait taper du pied mais je lui préfère « Just Before We Met », avec son mélange de ballade soyeuse (violons et carillons) et de complainte moderne à grands coups de claviers saturés.

Après un instrumental anecdotique mais délicieux, une guitare acoustique balance une mélodie accrocheuse, hérité elle aussi des Kinks. Avant d’être rejoint par les guitares, les claviers et la voix enjouée de Charlie Fink. Qui décrit très bien un sentiment très familier, surtout en ce moment : c’est dur de se sentir vivant et d’attendre toujours que sa chance vienne. Et il chante ça avec générosité, avec des chœurs et te redonne envie d’y croire l’espace de trois minutes d’un tube pop parfait.

« The Line » me replonge directement dans la même ambiance douce-amère que l’album précédent, avec cette fille qui regarde l’horizon et où la voix se fait plus grave. La ligne mélodique captive, on a l’impression de l’avoir entendu mille fois mais en même temps, elle sonne foutrement moderne. Un beau morceau, moins lumineux mais pas triste pour autant.

Le voyage au bout de la nuit se termine sur « Old Joy », un gospel étourdissant qui commence au piano, se poursuit avec une chorale et invite des sonorités étranges, des claviers mal accordés dans un mélange qui donne des frissons et conclue en apesanteur l’album. Les derniers mots résument le propos de manière simple et poétique : « Don’t dream of yesterday ».

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Voilà donc un album ludique, tout aussi frais que le tout premier, moins bouleversant que le second, mais qui étourdira tout de même les amateurs de pop bien faite et attachante. Je n'avais pas écrit autant sur un album, ni fait du titre par titre depuis bien longtemps alors merci au groupe d'avoir renouvelé mon enthousiasme pour ce genre d'exercice. Noah & The Whale peut fièrement entrer dans le panthéon des artistes contemporains qui ne me déçoivent jamais et me réjouissent à chaque apparition, en compagnie d’Adam Green, d’Herman Düne et de Turner Cody. Parce qu’écouter la voix familière de Charlie Fink, c’est comme retrouver un bon ami qui sait exactement ce que tu ressens et qui t’en offre une représentation musicale toujours aussi juste.     

Dimanche 16 janvier 2011 à 15:09

C'est complètement par hasard que j'ai découvert cet album, c'était au moment de sa sortie, au printemps 2008. J'étais là, sifflotant un air d'Andrew Bird dans les rayons de mon disquaire, lorsque mon regard a été attiré par cette pochette vintage, et un titre qui ne l'est pas moins. Sans jamais avoir entendu parler de la formation de Andy Cabic, j'achète la galette, qui s'avère être un album de reprises (ce que je n'apprendrais qu'au bout d'un mois d'écoutes intensives). Et très vite, je craque pour ces douze chansons de Vetiver (qui ne le sont pas). Des reprises d'artistes que je ne connais pas pour la plupart, et qui m'ont permis de découvrir des univers nouveaux, et de belles mélodies, qui se fondent parfaitement dans la voix de Cabic et dans les instruments de son groupe. Une atmosphère entre le folk dépouillé et la country entraînante. 

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Mention spéciale à "Roll On Babe" de Derroll Adams, une délicieuse ballade, ainsi qu'à "Hook & Ladder" de Norman Greebaum avec ses sympathiques sifflements et sa mélodie entêtante. A noter également, la présence de Vashti Bunyan sur "Sleep A Million Years", qui est pourtant le morceau qui m'a le moins convaincu. Un album qui a donc le mérite de nous faire découvrir des artistes peu connus de la musique américaine, à travers des reprises soignées.

Une jolie surprise, que j'ai réécouté aujourd'hui avec le même enchantement.

Vendredi 7 janvier 2011 à 17:00

2011 va marquer le grand retour des Strokes.
Si, si, on nous l'a promis, le nouvel (et ultime ?) album, ce sera au printemps, normalement. Je suis impatient.
Je vous avais déjà expliqué ma passion pour les rockeurs new-yorkais, mon amour pour Is This It, leur premier essai
(ici : 
http://dylanesque.cowblog.fr/76-hard-to-explain-2954638.html)

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En attendant la suite, j'aimerais maintenant revenir sur le dernier souvenir laissé par le groupe, il y a tout juste cinq ans. 
"First Impressions of Earth". Putain, ça remonte à loin, je venais tout juste d'attaquer le lycée avec déjà les deux premiers albums dans les oreillettes et une paire de Converses au pied. Je me souviens de la couverture de Rock&Folk (je m'étais abonné à Noël, pauvre de moi), les cinq musiciens affalés dans une rue de Brooklyn, l'air complètement blasés, comme s'ils avaient déjà pris un coup de vieux et voulaient tourner la page "sauveurs du rock" qu'ils avaient gentiment ouvert en début de décennie. Depuis, un tas de concurrents s'étaient engouffrés dans la brèche : les Libertines, Franz Ferdinand, Arctic Monkeys et les Kings of Leon, pour ne citer que les plus mémorables. Forcément, les Strokes, tout le monde les attendaient au tournant et moi le premier. Ma folie Dylan n'avait pas encore commencé, alors ils étaient toujours mon obsession musical du moment.  

Mais alors d'abord, il a fallu le trouver ce maudit album. Faire tous les disquaires du coin qui n'étaient pas foutus de l'avoir le jour de la sortie pour que finalement mon père tombe dessus dans un supermarché et me fasse la surprise. Une belle surprise sauf qu'entre-temps, j'avais commencé à lire les critiques et j'étais carrément anxieux puisqu'on lui faisait pas de cadeau à l'album. Avant de l'écouter, j'ai longuement étudié la couverture rayée, le livret aux images obsédantes, les pochettes alternatives à l'image de chaque membre du groupe que l'on pouvait choisir et bien sûr, j'ai choisi Julian Casablancas. 

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C'est son album à Casablancas. Le premier où l'on comprend vraiment que les Strokes, c'est son groupe à lui, une boîte à musique qui lui permet introspection, recherches sonores et personnelles, un terrain de jeu à la hauteur de son ego. Attention hein, les autres ont du talent, ils le prouveront par la suite sur leurs albums solos respectifs, mais on doit la plupart de la magie à leur leader charismatique qui a, il faut le dire, une putain de classe. Alors, il ressemble à quoi son projet ici ? Le titre laisse penser à un album concept, le journal de bord de quelqu'un qui débarque sur terre, d'un homme complètement aliéné par ses contemporains. Avide d'émotions et paumé. Et ce concept tient tout à fait la route et le malaise de Casablancas est flagrant sur la plupart des textes, qui font toute la beauté de l'ensemble, qui forment sa cohérence. Qui en font autre chose qu'une machine à tubes comme on aurait pu le reprocher à l'album précédent. 

Moi, j'aime également à penser qu'il s'agit d'un album de nuit blanche. Une nuit folle dans un monde moderne, agité. L'enthousiasme d'un début de soirée où tout est possible ("You Only Live Once", tube passé en boucle qui ne lasse jamais) de l'érotisme à tout les coins de rues ("Juicebox", single puissant), des rixes dans de sombres ruelles ("Heart in a Cage", parfait mélange de rage et de mélancolie), un plaisir adolescent ("Razorblade" qui rappelle les débuts), du bruit et de la fureur ("Vision of Division" tentative de hard rock qui ne convaincra pas tout le monde), des hallucinations ("Ask Me Anything", un ovni entêtant), une ville qui étouffe et dont on veut s'échapper ("Electricityscape"), des disputes tard dans la nuit ("Killing Lies"), des insomnies terribles ("Fear of Sleep") alors on se relève pour s'enivrer dans un bar louche ("15 Minutes"), le monde tourne, tout va trop vite, l'esprit s'emmêle ("Ize of The World", hypnotisante démonstration de force), le jour qui se lève dans un grand soupir ("Evening Sun") et l'espoir que les nuits suivantes seront encore plus folles ("Red Ligjht"). Le concept se tient, non ?

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Mais j'ai gardé une chanson de côté, celle qui, avec le recul, est ma préférée. "On The Other Side". C'était pas gagné au début, je la passais souvent, je trouvais l'intro maladroite, je ne m'y attardais pas. Et puis longtemps après, la mélodie et surtout le texte ont collé à mon humeur et je me suis à me la passer en boucle. Le texte parce que c'est le plus personnel, le plus percutant de l'album, celui qui explicite vraiment le mal-être de son auteur, le dégoût des autres, le dégoût de soi. Des souvenirs qui hantent et un amour salvateur. Des illusions perdues. De l'émotion. Tout ça amplifié par la voix de Casablancas, parfaite, bouleversante, c'est elle qui achève de faire de cet album un univers envoûtant. 

On lui aura reprocher des maladresses, des longueurs, du mauvais goût, et on reprochera la même chose à l'album solo de Casablancas. Moi, j'adhère totalement à ce son, à ces chansons, qui font partie de moi, qui résonnent toujours dans mon esprit et qui placent le groupe au dessus de la concurrence dans mon panthéon personnel du rock contemporain. Alors oui, j'attends avec un mélange d'impatience et d'inquiétude, la suite et probablement fin. J'attends de pouvoir revoir sur scène les Strokes, comme c'était le cas en juillet 2006, à Lyon, mon premier concert, le plus mémorable, le plus puissant. 

Voilà, j'ai terminé ma dissertation. Encore une fois, j'ai joyeusement disséqué l'une de mes nombreuses madeleines de Proust. J'ai écrit ça sur le brouillon durant un examen manqué. Notez moi si vous voulez. Moi, l'album, je lui colle un 18/20. 

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